La rentrée scolaire des enfants coûte de plus en plus cher et, pour faire face à certaines dépenses, l’État verse l’Allocation de rentrée scolaire. Si vous avez des enfants scolarisés, comme près de 3 millions de foyers, vous avez peut-être touché l’ARS aux alentours du 20 août. Combien avez-vous perçu, pourquoi certains ne la perçoivent pas, y a-t-il des conditions pour la percevoir, et comment est-elle calculée ?

Montant et calcul de l’ARS

L’allocation de rentrée scolaire est une aide dispensée depuis la rentrée 1974 pour faire face aux dépenses de la rentrée scolaire de vos enfants. Son montant, par enfant, varie en fonction de l’âge des enfants (voir tableau Montant de l’ARS ci-contre).

Montant de l’ARS selon l’âge de l’enfant :

Age de l’enfant Montant 2013 Montant 2014
6 à 10 ans 360,47 € 362,63 €
11 à 14 ans 380,36 € 382,64 €
15 à 18 ans 393.54 € 395.90 €

 

L’aide est réservée aux parents d’enfants nés entre le 16 Janvier 1996 et le 31 décembre 2008. Avant 6 ans pour les bébés ou les enfants en maternelle, d’autres mécanismes d’aides sont en jeu (prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) ou encore le Complément libre choix mode de garde par exemple), et après 18 ans, il n’y a plus grand-chose pour les parents d’étudiants.

Comment est calculé le montant de cette allocation : comme celui des autres prestations familiales, le calcul est fait en fonction d’un pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF pour les intimes). Vous êtes bien avancé ? Nous non plus.

A l’origine, la BMAF est égale au salaire mensuel d’un ouvrier parisien de la métallurgie soit 12 000 francs en 1949.
Puis elle a été revalorisée chaque année à peu près du niveau de l’inflation, hormis les coups de pouces exceptionnels de 1981 et de 2012 qui l’ont fait augmenter de 25 % chacun. Or, les salaires ont augmenté plus vite que l’inflation, et cette base a largement décroché du salaire d’un ouvrier, puisqu’elle est aujourd’hui fixée par décret, et s’élève à 406,21 euros au 1er janvier 2014.

Comme nous l’avons dit, toutes les prestations familiales sont calculées à partir de cette BMAF (prestations d’accueil de jeune enfant, allocation parent isolé, allocation pour les enfants handicapés etc.) : c’est un pilier de la politique familiale de notre pays.

En fouillant, nous avons trouvé la circulaire n° DSS/SD2B/ 2014/84 du 20 mars 2014 qui nous indique que l’allocation de rentrée scolaire correspond à :

  • 89,72 % de la BMAF pour les enfants de 6-10 ans soit une allocation de 364.45 euros,
  • 94,67 % pour les 11-14 ans, soit une allocation de 384,56 euros,
  • 97,95 % pour les 15-18 ans, soit une allocation de 397,88 euros.

Vous avez tout de suite noté l’écart avec les montants du tableau précédent. La différence est de 0,5 %, parce que, vous n’allez pas en revenir, le montant ainsi calculé est soumis à la CRDS. Le montant que vous touchez est net du précompte de CRDS.

Des enfants à charge

L’allocation est versée aux familles, sous condition de ressources, aux familles ayant un enfant à charge entre 6 et 18 ans.

Plafond de ressources par nombre d’enfants à charge :

Nb d’enfants à charge Plafond de ressources
1 24 137 €
2 29 707 €
3 35 277 €
Par enfant en plus  5 570 €

 

Un enfant à charge est, dans la grande majorité des cas, le digne héritier (ou la digne héritière, cela va sans dire), reconnu et élevé depuis son premier jour par les soins de ses parents aimants. Mais la définition administrative est, heureusement, plus large et l’existence d’un lien de parenté n’est pas obligatoire : l’enfant peut être adopté ou recueilli, il peut aussi s’agir d’un neveu ou d’une nièce. Il faut également assurer son entretien et lui fournir nourriture, logement, habillement etc. de façon “ effective et permanente ”. L’enfant à charge doit également demeurer en France, et des dérogations sont prévues pour les séjours à l’étranger de 3 mois seulement : pas question de toucher l’ARS et d’envoyer l’adolescent au lycée français de Tokyo, sauf cas particuliers (pour bénéficier de soins notamment).

Et bien entendu votre enfant doit être scolarisé.

Les conditions d’attribution dépendent également des ressources du foyer. Attention, les ressources sont calculées sur les revenus de l’année N-2 ! C’est-à-dire pour 2014, ce sont les revenus de 2012 qui sont pris en compte. On notera au passage l’adaptation remarquable de l’administration française à notre époque où 2 ans dans une vie professionnelle sont suffisamment longs pour que les revenus aient complètement évolué entre-temps. En effet, les carrières ne durent plus 40 ans dans la même entreprise : en 2011, le taux de rotation (voir définition ci-dessous), moyenne des taux d’entrée et de sortie, s’établit à 51,7 %, et monte à 64 % dans le tertiaire. Les changements d’emploi et donc de rémunération sont devenus très fréquents. Combien gagniez en 2012 ?

Le taux de rotation (ou turn-over)

est la moyenne des taux d’entrée et de sortie. Depuis la publication du 1er semestre 2009, les taux d’entrée et de sortie sont calculés hors transferts entre établissements d’une même entreprise. Pour une période donnée, le taux d’entrée (respectivement de sortie) est le rapport entre le nombre total d’entrées (respectivement de sorties) de la période et l’effectif moyen sur la période. La différence entre le taux d’entrée et le taux de sortie ne reflète qu’approximativement l’évolution de l’emploi car la prise en compte de la démographie des entreprises est très délicate. Cette différence n’est pas commentée.

Les entrées comprennent les embauches en contrat à durée déterminée et en contrat à durée indéterminée. Les CDD comprennent les contrats d’apprentissage et les contrats aidés, à la différence d’autres sources comme l’enquête Emploi de l’Insee.

Les sorties comprennent les fins de CDD, les démissions, les licenciements économiques et pour motif personnel, les départs à la retraite, les fins de période d’essai, les ruptures conventionnelles et d’autres motifs non détaillés ici (accidents, décès, non déclaration,…).

Les ressources du foyer (vous et votre conjoint ou concubin) comprennent principalement :

  • salaires, traitements,
  • allocations de chômage et indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS pour les intimes, ce sont les allocations d’arrêt maladie),
  • pensions de retraite,
  • revenus du patrimoine.

Époque de tricherie et de suspicion mêlées, et époque du Big Data (mégadonnées en français) et de l’information croisées : la CAF récupère désormais automatiquement les revenus déclarés auprès des impôts.

Nous noterons la formidable souplesse d’esprit de l’administration qui considère que les concubins sont deux personnes différentes aux yeux de l’impôt sur le revenu, ce qui ne permet pas le bénéfice total du quotient familial, alors que pour les impôts locaux et les plafonds de ressource de la CAF, les concubins sont bel et bien un couple dont on additionne les revenus. On gratte là où on peut.

24 137 euros de plafond, c’est assez peu. Un couple gagnant chacun 1 500 euros nets par mois avec un enfant est en général à la limite du plafond.

L’ARS peut également être versée si le jeune est en apprentissage, à condition que son salaire ne soit pas au-dessus de 885,81 euros net, ce qui ne doit pas arriver souvent avant 18 ans, à moins d’être apprenti dans la banque de Papa.

Le coût de la rentrée scolaire

Les études estiment le coût de la rentrée à environ 200 euros en moyenne par enfant : fournitures scolaires (papeterie, trousse, cartable, calculatrice) et achats de vêtements (articles de sport : jogging, paire de chaussure) principalement : voyez notamment les études de Famille de France. Ces coûts ont augmenté de 1,4 % en moyenne pour la rentrée 2013 par exemple, et la hausse est contenue grâce à la concurrence féroce que se livrent les supermarchés :

Par catégorie de produits Par circuit de distribution
44,87 €
en papeterie
199,40 €
en magasin spécialisé
96,13 €
en fournitures non papetières
197,67 €
en supermarché
44,25 €
en vêtements de sport
170,51 €
en hypermarché
Source : http://www.familles-de-france.org/node/1541

 

Auxquels il faudra ajouter les frais de cantine et de garderie, les frais de transport, l’assurance scolaire etc. : l’allocation de rentrée scolaire n’est pas de trop.
Et nous ne parlons pas des frais des lycéens professionnels en matériel technique, livres spécialisés etc.

La polémique récurrente

Tous les ans, la polémique ressurgit pour savoir si les parents utilisent bien cette allocation pour la rentrée scolaire de leur progéniture ou plutôt pour acheter un ordinateur ou un téléphone portable.

Les propositions pour réformer cette allocation vont bon train :

  • bons d’achat en lieu et place de la somme d’argent sur le compte bancaire,
  • création de “ chèques rentrée-scolaire ” sur le modèle du ticket restaurant par exemple.
  • dégressivité de la prime en fonction des revenus : une prime plus élevée pour les foyers très modestes et de moins en moins élevée au fur et à mesure des revenus, plutôt que ce seuil de ressources binaire du système actuel qui fait que l’on touche entièrement ou pas du tout, l’allocation.

Même Nadine Morano, quand elle était secrétaire d’État à la famille en 2010, avait repoussé les deux premières propositions. Ces réformes signifieraient la mise en place d’une énième usine à gaz, un centre de traitement qui alourdirait les coûts de gestion jusqu’à 30 millions d’euros avait-elle dit.

La dernière option en revanche pourrait être mise en place assez facilement, mais taclerait encore une fois l’égalité des français. Le seul dénominateur commun à la politique sociale et fiscale en France est la famille, d’autres champs méritent d’être réformés avant celui-là, nous semble t-il.

Pour faire taire la polémique, Une enquête menée par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), via dix Caf auprès de 10 000 allocataires, a montré que “ neuf allocataires sur dix utilisent l’ARS pour deux postes de dépenses principaux : l’achat de matériel scolaire et l’achat de vêtements pour la rentrée. Viennent ensuite le paiement des frais de cantine, de transport ou d’assurance scolaire, l’achat d’articles de loisirs ou de sport pour l’enfant ”. Pas vraiment de quoi faire sauter le système.