LBO : Leverage Buy Out, l’acronyme peut faire peur ; dans l’imaginaire véhiculé par le JT de 20 heures, il est synonyme de haute finance internationale, de capitalisme sauvage, de plans sociaux orchestrés par des actionnaires sans foi ni loi.

La réalité est toute autre. Le LBO est un montage financier dont le but est de racheter une entreprise en empruntant la plus grande partie et en créant une société intermédiaire appelée holding. Une holding n’est rien d’autre qu’une société possédant les parts d’autres sociétés et n’ayant pas d’activité économique propre.

1. Les repreneurs vont apporter des fonds propres à la holding.

2. La holding va emprunter le reste de la somme demandée par le vendeur ; le but de cette opération consiste à pouvoir emprunter un montant maximum pour un minimum de fonds propres apportés par les acquéreurs.

3. La holding rachète les parts de la société cible au vendeur pour le prix convenu.

4. La société cible fait des bénéfices et remonte des dividendes chaque année à la holding qui est donc sa maison mère.

5. Grâce aux dividendes, la holding rembourse les dettes contractées.

 

Peu de capital, beaucoup d’endettement et une optimisation fiscale : les effets leviers.

La holding va donc avoir un bilan très déséquilibré avec un capital faible au regard de son endettement. En revanche, le fait de passer par une société holding permet également d’avoir un actionnariat multiple et donc de regrouper des fonds propres de plusieurs personnes ou sociétés pour mieux emprunter.

On va donc avoir 3 effets de levier :

  • Le levier Financier
  • Le levier Fiscal
  • Le levier Juridique

 

Le principal est le levier financier.

L’utilisation de l’endettement permet de maximiser les fonds investis et offre une rentabilité par euro investi par les repreneurs très intéressante. Le financement de l’opération est supporté par la société cible en réalité.

Le double effet de levier fiscal : intégration fiscale et régime mère-fille.

Pour optimiser la fiscalité, il faut utiliser deux systèmes qui vont se compléter : l’intégration fiscale qui permet de ne pas payer d’impôt sur les sociétés et le régime mère-fille qui permet l’exonération des dividendes.

La holding a donc contracté un emprunt et va comptabiliser en charges les intérêts des emprunts.

Or, la holding n’ayant pas d’activité commerciale, celle-ci va donc subir une perte à la fin de l’exercice.

La société cible doit remonter des dividendes et faire un résultat largement positif qui engendrera un important impôt sur les sociétés à supporter.

C’est là qu’intervient l’intégration fiscale : pour faire simple, l’intégration fiscale permet d’agréger les bénéfices et les pertes de toutes les sociétés d’un groupe pourvu que les sociétés filles soient détenues à 95 % par la mère. L’idée est donc d’arriver à un résultat d’ensemble :

Bénéfices de la cible – pertes holding = 0

L’objectif consiste à ne pas payer d’IS chaque année malgré les bénéfices de la société cible grâce aux déductions des intérêts de l’emprunt de la holding.

Les dividendes reçus sont normalement un produit imposable classique. Le régime mère-fille est un régime fiscal évitant la double imposition au sein d’un groupe : les dividendes distribués par la société fille ont déjà été imposés à l’IS, on ne va donc pas les comptabiliser comme produit dans la société mère et les imposer une deuxième fois. Donc, on retire du résultat, le produit des dividendes pour obtenir le résultat fiscal. Pour appliquer cette règle, la société mère doit détenir des titres de participation correspondant à au moins 5 % du capital de la filiale et ce, depuis au moins 2 ans. On ne va prendre en compte qu’une quote-part des frais et charges de 5% des dividendes dans le résultat fiscal.

Exemple de régime mère-fille : une société A fait 2 millions d’euros de bénéfices, possède une société fille B depuis plus de 2 ans et a opté pour le régime mère fille.

La société A a comptabilisé un dividende reçu de la société B de 1 million d’euros.

Son résultat fiscal est de : 2 000 000 – 1 000 000 + 5% x 1 000 000 = 1 050 000 euros

Elle ne sera donc imposable que sur ces 1 050 000 euros et non sur 2 000 000.

Le régime mère-fille permet enfin d’exonérer les plus-values faites sur la vente des titres ce qui fait que si la holding revendait ses titres au bout de 2 ans, la plus-value qu’elle pourrait faire serait exonérée également (régime qui permet la transmission d’entreprise).

L’effet de levier juridique.

Il résulte de la constitution de la holding : créer une société permet de trouver plusieurs actionnaires, et notamment des professionnels tels que les sociétés de capital investissement, ou encore la banque qui participerait alors à la gestion de la société pour s’assurer du remboursement de son prêt.

Une société cible à la rentabilité solide.

Le but du montage est le remboursement de la dette contractée généralement auprès d’une banque, par les dividendes que rapporte la société cible. La solidité financière de la société cible est essentielle puisque toute l’opération est fondée sur la trésorerie qui va remonter depuis cette société vers la holding pour que la holding paie ses dettes.

Mais alors, c’est la banque qui prend les risques ? En effet, c’est bien pourquoi la solidité financière de la société cible est essentielle.

Attention, le risque est grand. L’opération repose sur l’endettement. Il ne faut pas que la société cible ait des difficultés financières : un retournement de la conjoncture, une baisse de la rentabilité de la société cible qui ne permettrait plus de remonter assez de dividendes pour payer l’emprunt, pourrait conduire au dépôt de bilan.

Un bon banquier ne prend, bien entendu, aucun risque inconsidéré. En effet, le financement de l’opération sera le plus souvent soumis à un contrat particulier qui contient des clauses spécifiques généralement appelées « covenants ».

Ces clauses prennent la plupart du temps la forme d’’objectifs qui, dès lors qu’ils ne sont pas respectés, peuvent entraîner le remboursement anticipé du prêt. Ces objectifs sont des ratios financiers à tenir, permettant de contrôler la solvabilité et de minimiser pour la banque tout risque de non-remboursement de l’entreprise.

Trois ratios sont généralement retenus :

  • Le taux d’endettement, c’est-à-dire le ratio dettes bancaires et financières /Résultat d’exploitation qui doit être inférieur à 4.
  • Le ratio cash-fl ow disponible / total des annuités de remboursement de dette qui doit être supérieur à 1, avec une sécurité de 5 à 10 % minimum ;
  • Le ratio Résultat d’exploitation / frais financiers totaux que les banques aiment maintenir au-dessus de 3.

La rupture des « covenants » n’entraîne pas forcément l’exigibilité immédiate de la dette. En effet, les banques ayant pratiqué ces opérations sont conscientes des forces et des faiblesses de celle-ci, et se montrent conciliantes. La principale raison de cet état de fait est souvent une conjoncture plus faible que prévu. Il s’ensuit des réaménagements du contrat : renégociation de l’emprunt ou des clauses elles-mêmes (des covenants plus souples par exemple), des allongements de maturité ou même des reports de remboursements.

Un endettement très lourd entraîne une charge de la dette, des intérêts d’emprunt très élevés et soumet à une forte pression la société cible qui pourra difficilement réaliser des investissements ce qui réduira son potentiel de croissance et d’innovation.

La société rachetée par ce mécanisme doit être une société rentable qui exerce une activité en phase de maturité et sur un marché stable.

Un exemple ?

Un bon exemple est celui des professions libérales : pharmaciens, cabinets médicaux, cabinets d’architecture…. Si vous avez la chance d’avoir un parent dirigeant de société et que vous aimeriez reprendre l’entreprise familiale, le rachat par LBO est un bon moyen de procurer à papa ou maman un joli pécule de départ en retraite.

D’ailleurs, à titre personnel, vous n’y engagez qu’un montant minimum et votre holding rachète la société dont vous devenez le patron. Ne prenez pas le risque de perdre pas vos clients car vous auriez du mal à rembourser vos dettes.

Vous voyez, on est bien loin du CAC 40 !