Le Régime social des indépendants (acronyme RSI, à ne pas confondre avec Régime Simplifié d’imposition) est l’organisme qui gère le système d’assurance maladie-décès et l’assurance retraite et invalidité des artisans, des commerçants et plus généralement de beaucoup de travailleurs non-salariés (chef d’entreprises notamment, mais pas tous…). Il fait également office d’interlocuteur social unique (ISU) pour l’ensemble des non-salariés hormis les agriculteurs.

Le RSI est décrié depuis sa création en 2006 par l’ensemble de ses affiliés qui manifestent dans la rue régulièrement contre ses dysfonctionnements, ses retards, son manque d’efficacité, globalement son incompétence. Des plans pour le réformer voient le jour à un rythme régulier sans parvenir jusqu’à présent, à apaiser la grogne. Le dernier en date, du 25 juin 2015, prévoit 20 nouvelles mesures pour enfin améliorer son fonctionnement. Sera-t-il le dernier ?

Le RSI : deuxième régime social de protection sociale en France

Le RSI est à la fois :

  • L’organisme chargé de la protection sociale de ses affiliés (une sécurité sociale particulière),
  • Un organisme de retraite,
  • L’interlocuteur social unique (ISU) pour ses affiliés, c’est-à-dire l’organisme chargé du recouvrement de l’ensemble des cotisations : CSG, CRDS, cotisations familiales, retraite de base et complémentaire, invalidité-décès, assurance maladie et indemnités journalières.

Le RSI, qui gère la protection sociale de 6,1 millions de personnes, est le second régime de protection sociale après le régime général. Le régime a recouvert 11 milliards d’euros de cotisations et 4,5 milliards au titre de la contribution sociale soit 14,5 milliards d’euros au titre de 2014. Il a servi 17,7 milliards d’euros de prestations dont 8,5 milliards de prestations d’assurance maladie au titre des régimes de base, 9 milliards de pensions de retraite (dont 7,3 pour les retraites de base) et 288 millions d’euros de pensions invalidité-décès.

Le régime est géré par une caisse nationale et 30 caisses régionales : 3 caisses en Île de France, 2 caisses en PACA, 2 caisses en Rhône-Alpes, et 1 caisse dans les autres régions, auxquelles sont ajoutées 2 caisses particulières dédiées à l’assurance maladie des professions libérales.

Toutes les caisses sont gérées par un conseil d’administration composé de commerçants et industriels, d’artisans et de représentants de professions libérales. Les conseils d’administration des caisses régionales sont également composés d’un tiers de retraités et de deux tiers d’actifs. Les 942 membres de ces conseils sont élus au suffrage universel, dans des élections très peu suivies : 19 % de votants aux dernières élections.

Qui cotise et pour quelles prestations ?

Doivent donc cotiser au RSI les indépendants, c’est-à-dire :

  • Les micro-entreprises,
  • les entreprises individuelles comprenant notamment :
    • les artisans,
    • les commerçants,
  • les chefs d’entreprise (gérants de SARL majoritaires par exemple)
  • les auto-entrepreneurs.

Les prestations garanties par le régime sont très proches de celles garanties pour les salariés :

  • La cotisation maladie-maternité permet de bénéficier d’une couverture maladie-maternité équivalente à celle des salariés (dont la CMU-C en cas de faibles revenus).
  • La cotisation indemnités journalières permet d’obtenir le versement d’indemnités journalières en cas d’arrêt de travail pour cause de maladie ou d’accident, en sachant que les indemnités sont calculées sur la base du revenu moyen soumis à cotisations des trois dernières années.
  • La cotisation retraite de base et complémentaire qui permet d’obtenir une retraite de base et complémentaire obligatoire calculée de la même manière que celle des salariés.
  • La cotisation invalidité-décès permet de bénéficier d’une pension invalidité avant le départ en retraite sous conditions tandis que l’assurance décès garantit le versement d’un capital décès qu’il soit cotisant ou retraité.
  • La cotisation allocations familiales donne droit aux prestations familiales équivalentes à celles des salariés, et pour les mêmes conditions (conditions de ressources par exemple).
  • La contribution à la formation professionnelle qui donne droit à la formation professionnelle continue (obligatoire pour certaine profession notamment artisanale)  et qui sera collectée soit par :
    • Le RSI pour les commerçants,
    • Le centre des Impôts puis reversé à la chambre des métiers et de l’artisanat pour les artisans,
    • L’URSSAF pour les professions libérales.
  • CSG, CRDS et CASA qui contribuent de manière globale au financement de la sécurité sociale.

Sur quels revenus ?

Les taux de cotisations s’appliquent sur la base de la somme des revenus professionnels :

  • Les bénéfices de l’entreprise pour les entrepreneurs individuels ou dans le cadre des sociétés soumises à l’impôt sur le revenu,
  • La rémunération de l’assuré dans le cas de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés,
  • Les dividendes perçus dépassant 10 % du capital de l’entreprise, ou 10 % du patrimoine affecté dans le cadre des EIRL (Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée qui sont des entreprises individuelles pour lesquelles une partie du patrimoine privé est “protégé”, c’est-à-dire non confondu avec l’activité, à la différence des entreprises individuelles classiques).

Les gérants majoritaires appliquent également l’abattement de 10 % pour frais professionnels dont bénéficient également les salariés, mais peuvent souscrire à l’option pour les frais réels.

Un mode de paiement particulier

Le régime de paiement normal des cotisations s’apparente au mode de calcul de l’impôt sur le revenu. On calcule les cotisations de l’année N sur la base des revenus de l’année N-1 suite au dépôt de la Déclaration Sociale des Indépendants (DSI) qui se fait aux mêmes dates que les déclarations des sociétés (en 2015 jusqu’au 19 mai en version papier et jusqu’au 9 juin en ligne). Suite à la déclaration des revenus de l’année N (en mai N+1), il est alors procédé à une régularisation des cotisations dues au titre de l’année N.

Il est à noter que l’on procède sur l’année précédente seulement depuis le 1er janvier 2015, tandis qu’auparavant les cotisations de l’année N étaient calculées sur les revenus N-2 et faisaient l’objet d’une régularisation en N+1, une fois les revenus de N connus ce qui ne simplifiait pas les calculs et les provisions de trésorerie.

Les problèmes de la cotisation minimale et du début d’activité

Cotisation minimale :

Quel que soit votre revenu, et même si vous n’en avez pas, une cotisation minimale est obligatoire et calculée sur une base forfaitaire.
Les auto-entrepreneurs dans le cadre du “pas de revenus, pas de charges” ne sont pas soumis à cette cotisation minimale.

COTISATIONS

BASE DE CALCUL en €

TAUX

MONTANT MINIMAL

Maladie-Maternité

3 804

6,5 %

247 €

Indemnités journalières

15 216

0,7 %

107 €

Retraite de base

2 929

17,4 %

510 €

Retraite complémentaire

1 997

7 %

140 €

Invalidité-décès

7 608

1,3 %

99 €

Formation professionnelle

37 548

0,25 %

94 €

Il vous faudra donc payer 1 197 € en tout pour avoir le droit d’exercer votre activité, même si celle-ci ne vous procure aucun revenu.

Il est à noter que si vous êtes bénéficiaires du RSA ou retraité, la cotisation minimale ne s’applique pas.

Première et deuxième année d’activité :

La première année d’activité fait également l’objet de calculs à partir de bases forfaitaires sur lesquelles seront appliqués les taux de cotisations. Les cotisations seront recalculées par la suite une fois les revenus réels connus (c’est-à-dire suite au dépôt de la DSI). Le début de la deuxième année est également soumis à une base forfaitaire puisque les revenus réels de la première année ne sont connus qu’en mai ou juin de la deuxième année.

COTISATIONS

BASE DE CALCUL 1re année

BASE DE CALCUL 2e année

Maladie-maternité

7 228 €

10 271 €

Indemnités journalières

15 216 €

15 216 €

Retraite de base et complémentaire / Allocations familiales / CSG-CRDS

7 228 €

10 271 €

Invalidité-décès

7 608 €

10 271 €

Dès la deuxième année d’activité, la régularisation des cotisations est étalée sur les échéances à venir (afin d’éviter un étranglement de trésorerie), et on effectue un calcul des cotisations de l’année en cours en tenant compte de la déclaration des revenus.

Le paiement est au choix mensuel ou trimestriel, et des majorations de retard sont appliquées dès le deuxième incident de paiement.

Des mesures à la hauteur des dysfonctionnements ?

L’enfer étant souvent pavé de bonnes intentions. Le RSI a été créé en vue d’une simplification pour les indépendants en regroupant des caisses : la Caisse Nationale d’assurance maladie des non-salariés (CANAM), la caisse autonome de compensation de l’assurance vieillesse artisanale (CANCAVA), la caisse de compensation de l’organisation autonome nationale de l’industrie et du commerce (ORGANIC). Le versement des cotisations était lui aussi éclaté en diverses structures, d’où la création de l’ISU (interlocuteur social unique).

C’est ainsi que les spécificités du régime (par exemple certaines ouvertures de droit liées au paiement effectif des cotisations, les assiettes et taux différents du régime général, le paiement d’une cotisation minimale inexistante pour les salariés) ont abouti à un désastre tant organisationnel, un “mauvais compromis” dit la Cour des comptes dans son rapport de 2012, que technique (“les difficultés des systèmes d’information de l’ACOSS comme de ceux dont le RSI héritait des caisses qu’il fusionnait ont été négligées et n’ont pas été considérées comme des facteurs de risque” dit la Cour des comptes).

Tout ceci conduit à “une catastrophe industrielle pesant sur toutes les fonctions du RSI, avec des conséquences sur le régime général”, toujours dixit la Cour des comptes : erreurs de calculs de cotisations, dossiers bloqués. D’ailleurs, même la liquidation des retraites comprenant des périodes de cotisations postérieures au 31 décembre 2007 a dû être traitée manuellement pendant de longs mois (d’où un stock de dossiers accumulés, vous vous en doutez).

Jusqu’ici, les gouvernements successifs ont établi des plans avec un succès que l’on qualifiera de mitigé aux dires des assurés.

La suite de l’histoire jugera donc le dernier plan en date du 25 juin 2015 (25_06_15_-_DP_-_20_mesures_pour_le_RSI.pdf) qui prévoit 20 mesures parmi lesquelles :

  • L’ajustement du calendrier de paiement des cotisations par rapport au revenu effectivement perçu,
  • L’information du montant des cotisations dues dès la déclaration des revenus en ligne,
  • Une accélération des remboursements de cotisations,
  • La mise en place du télérèglement,
  • La clarification des courriers envoyés aux assurés (quand même !),
  • L’amélioration de la qualité de l’accueil téléphonique (si vous connaissez des gens concernés par le RSI, demandez-leur de vous raconter leurs coups de téléphones au RSI, un sketch assuré à chaque fois, incroyable…),
  • Le déploiement de médiateurs dans chaque département pour résoudre les litiges,
  • Privilégier la signification des actes de recouvrement par lettre recommandée avec accusé de réception plutôt que par huissier.

Bref ce n’est pas gagné.