Dans l’histoire d’un entrepreneur, il arrive régulièrement que ce dernier ait créé plusieurs structures pour différentes activités. Au cours de ses rencontres, de ses idées, certains projets ont mieux fonctionné que d’autres. Le rôle du gérant d’entreprise est alors d’optimiser les résultats fiscaux de ses entreprises.

Une activité qui fonctionne mieux qu’une autre signifie que l’une dégage un bénéfice imposable important tandis que l’autre fait un bénéfice moins imposant ou une perte.

L’intégration fiscale consiste à consolider l’ensemble des résultats fiscaux des sociétés d’un groupe. La société holding détermine le résultat d’ensemble imposable à l’impôt sur les sociétés et paie l’impôt dû par le groupe intégré fiscalement.

Pour mettre en place l’intégration fiscale, les conditions suivantes doivent être remplies :

  • les sociétés doivent être soumises à l’impôt sur les sociétés et imposables en France,
  • les sociétés intégrées doivent ouvrir et clore leurs exercices, d’une durée de 12 mois, aux mêmes dates. Toutefois, à tout moment au cours de la période de 5 ans, la durée des exercices peut être modifiée, une fois, pour être inférieure ou supérieure à 12 mois,
  • le capital social de la société holding ne doit pas être détenu à 95 % ou plus, directement, par une autre société ayant son siège social en France et passible de l’IS.

Le périmètre de l’intégration fiscale

Le groupe fiscalement intégré peut être constitué par la société holding avec une ou plusieurs de ses filiales dont elle détient directement 95 % au moins du capital social, et aussi avec l’ensemble de ses filiales et sous-filiales appartenant à une chaîne ininterrompue de participations successivement détenues à 95 % au moins.

Le périmètre de l’intégration fiscale peut être révisé chaque année. La décision doit être notifiée à l’administration fiscale au plus tard dans le délai de dépôt de la déclaration de résultats de l’exercice précédent.

L’option pour l’intégration fiscale

Le régime de l’intégration fiscale est une option qui doit être formulée par la société mère du groupe.

L’option peut être notifiée à l’administration fiscale jusqu’à la date de déclaration d’impôt sur les sociétés pour le résultat de l’exercice précédent.

L’option prend la forme d’une lettre (modèle fourni par l’administration fiscale) avec la liste des sociétés intégrées et l’accord formel de chacune d’elles.

La durée du régime de l’intégration fiscale est de  5 exercices, renouvelable par tacite reconduction.

Le fonctionnement de l’intégration fiscale

Tout d’abord, chaque société intégrée doit calculer son propre résultat fiscal, comme si elle était imposée séparément, puis son résultat qui sera repris pour déterminer le résultat d’ensemble (qui tient compte des règles de calcul du résultat spécifiques à l’intégration fiscale).

Ensuite, le résultat d’ensemble formant la base de calcul de l’impôt dû par le groupe fiscalement intégré est déterminé par la société holding :

  1. en additionnant les résultats individuels de chaque société intégrée,
  2. puis en appliquant divers correctifs ayant principalement pour objet d’éviter certaines doubles impositions, certaines doubles déductions, ou pour neutraliser les cessions d’immobilisations et les abandons de créances entre membres du groupe.

La société holding est redevable de l’impôt dû par le groupe. Les crédits d’impôts collectés par les filiales peuvent être imputés sur le montant de l’impôt à payer.

Les avantages de l’intégration fiscale

Un groupe de sociétés est composé d’une société mère et de filiales. Chaque entité est en principe redevable de l’impôt sur les sociétés. Chaque société du groupe conserve ainsi son propre déficit  qu’elle ne peut pas imputer sur les bénéfices d’autres filiales.

De plus, la gestion du groupe engendre, par ailleurs, une multitude de flux financiers entre la société mère et les filiales ou entre les filiales elles-mêmes (perception de dividendes, abandons de créances, cessions d’immobilisations…). Chaque flux financier engendre des conséquences fiscales qui peuvent être pénalisantes  pour la gestion du groupe (par exemple, une filiale peut hésiter à céder des actifs à une autre filiale pour éviter la plus-value de cession).

Le régime de l’intégration fiscale vise à corriger l’aspect paralysant de cette fiscalité. Le régime de l’intégration fiscale va ainsi permettre de centraliser la fiscalité de l’IS sur la société mère mais aussi de neutraliser certains aspects fiscaux.

Évidemment, la filiale ne peut imputer ses déficits antérieurs à l’entrée dans le régime  de l’intégration fiscale que sur son propre bénéfice. Une filiale ne peut donc pas imputer son déficit antérieur sur le bénéfice de l’ensemble du groupe. Le dirigeant doit donc anticiper la réalisation future de déficits par une filiale postérieurement à son entrée dans le régime de l’intégration fiscale.

Dans ce cas, les résultats déficitaires de certaines sociétés du groupe et/ou de la société holding seront additionnés aux bénéfices réalisés par les autres entités. Le résultat fiscal du groupe qui sera imposé l’impôt sur les sociétés est donc optimisé. Avec une imposition séparée au nom de chaque société du groupe, le montant global de l’impôt serait supérieur.

Lorsque toutes les sociétés du groupe sont bénéficiaires, l’intégration fiscale peut tout de même présenter des avantages. Cela permet notamment :

  • de supprimer l’imposition de la quote-part de frais et charges afférente aux produits de participation intragroupe,
  • de limiter la déperdition des crédits d’impôt dont le montant excède les possibilités d’imputation dont dispose la société membre à raison de son seul résultat fiscal.

Illustration : un groupe intégré est composé de plusieurs entités : la société mère A et les filiales B, C et D.

  • A réalise un résultat nul.
  • B réalise un bénéfice de 100 000 euros
  • C réalise un déficit de 60 000 euros
  • D réalise un bénéfice de 100 000 euros et dispose d’un déficit reportable de 300 000 euros (antérieur au régime de l’intégration fiscale).

B déclare un bénéfice de 100 000 euros mais ne s’acquitte pas de l’impôt, la perte de 60 000 euros de C se reporte sur le résultat du groupe, D déclare un résultat nul (imputation du déficit antérieur sur ses 100 000 euros de bénéfices), les 200 000 euros de déficits restants ne sont pas imputables sur le résultat du groupe.

En définitif, la société mère A déclare pour l’ensemble du groupe 40 000 euros de bénéfices (0 + 100 000 – 60 000 + 0) et s’acquitte donc de 13 333 euros d’IS. L’IS total versé par le groupe aurait représenté 33 333 euros (bénéfices de B) sans le régime de l’intégration fiscale.

Intégration fiscale : quote-part des dividendes réduite à 1%

Pour les sociétés qui ne sont pas en intégration fiscale, la quote-part pour frais et charges est maintenue à 5%.

Pour les sociétés en intégration fiscale : l’ancienne législation

Les sociétés qui percevaient des dividendes de leurs filiales pouvaient bénéficier du régime mère-fille. Ce régime leur permettait de ne pas être soumises à l’impôt sur les sociétés sur ces distributions à l’exception d’une quote-part de 5% pour frais et charges.

Si la société mère optait pour le régime de l’intégration fiscale prévue à l’article 223A et suivant du CGI, les dividendes versés par les sociétés intégrées fiscalement étaient déduits du résultat global imposable dans leur intégralité. La quote-part de 5% étant neutralisée, ces dividendes étaient alors entièrement exonérés d’impôt sur les sociétés.

Dans la mesure, où seules les sociétés établies en France, pouvaient être comprises dans le périmètre de l’intégration fiscale, cette législation avait créé une différence de traitement entre les dividendes provenant de filiales françaises et ceux provenant d’autres sociétés.

C’est ce qu’a modifié l’arrêt Stéria rendu le 2 septembre 2015 par les juges européens qui ont sanctionné la France pour sa politique de taxation des dividendes jugée contraire au droit de l’Union, ce qui a conduit à l’élaboration d’une nouvelle législation.

Pour les sociétés en intégration fiscale : la nouvelle législation 2016

Suite à l’arrêt Stéria et afin de limiter les demandes de dégrèvement des entreprises étrangères, issues de l’arrêt Stéria, aux dividendes versés avant 2016, le Gouvernement a fait adopter un amendement à la loi de finances rectificative pour 2015 permettant d’être en conformité avec la législation européenne.

L’article 40 de cette loi abaisse de 5 à 1 % le taux de la quote-part pour frais et charges relative aux dividendes perçus de filiales éligibles au régime des sociétés mères et incluses dans le périmètre de l’intégration fiscale. En outre, la neutralisation de cette quote-part dans le cadre de l’intégration fiscale est supprimée. En revanche, les groupes non intégrés fiscalement continuent d’être soumis à la réintégration d’une quote-part de 5%.

De manière à appliquer un régime équivalent aux filiales des entreprises étrangères, le taux de 1% s’applique également aux dividendes perçus par des sociétés établies dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre Etat parti à l’accord sur l’Espace économique européen qui remplissent les conditions pour être membres du groupe et qui sont soumises dans leur pays à un impôt analogue à l’impôt sur les sociétés (article 216 du CGI).

Les groupes intégrés fiscalement et composés essentiellement de filiales françaises seront les principaux perdants de cette réforme dans la mesure où le niveau d’exonération des dividendes correspondant passe de 100% à 99%.

L’administration fiscale vient de commenter les nouvelles dispositions applicables aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016 (actualité BOFiP du 4 mai 2016) et donne notamment 2 exemples.

Exemple 1 : La société M, établie en France, détient directement à 100 % la société F, également établie en France, et avec laquelle elle forme un groupe vertical (en application du premier alinéa du I de l’article 223 A du CGI). La société F détient à 100 % la société A, soumise en Italie à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés, et qui remplit les conditions pour être membre du groupe vertical formé par la société M, sauf celle d’être soumise à l’impôt sur les sociétés en France.

Dans ces conditions, la quote-part de frais et charges du régime des sociétés mères s’applique au taux de 1 % aux distributions que perçoit la société F de la société A.

Exemple 2 : Comme dans l’exemple 1, la société M détient directement à 100 % la société F, et ces deux sociétés sont soumises à l’impôt sur les sociétés en France dans les conditions de droit commun. Mais à la différence de l’exemple 1, la société A, soumise en Italie à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés, est détenue à 5 % par la société F, et à 95 % par la société E, établie en Allemagne. La société E détient à 100 % la société M.

Si la société M exerce l’option pour former avec la société F un groupe vertical (en application du premier alinéa du I de l’article 223 A du CGI), la quote-part de frais et charges s’applique au taux de 5 % aux distributions que perçoit la société F de la société A. En effet, la société A n’est pas détenue à 95 % au moins, directement ou indirectement, par la société mère M : elle ne remplit donc pas les conditions propres à la forme du groupe auquel appartient la société F bénéficiaire des distributions (groupe vertical).

En revanche, si la société M exerce l’option pour former avec la société F un groupe horizontal dont est entité mère non résidente la société E (en application des dispositions du deuxième alinéa du I de l’article 223 A du CGI), la société A remplit les conditions pour être membre de ce groupe horizontal (puisqu’elle est détenue à 95 % au moins par l’entité mère non résidente E, directement ou indirectement dans les conditions prévues pour les groupes horizontaux), hormis celle d’être soumise à l’impôt sur les sociétés en France. Dans ces conditions, la quote-part de frais et charges du régime des sociétés mères s’applique au taux de 1 % aux distributions que perçoit la société F de la société A.