Poids de la dette, taux d’intérêts, faiblesse des pouvoirs publics… Nous entendons à longueur de journée des discours pointant nos faiblesses économiques. A écouter l’ensemble des informations, la France n’aurait pas un sou. C’est faux ! Le budget de la France est déjà conséquent. Certains crient à la mauvaise répartition. Avons-nous conscience de toute l’action étatique ? En tout cas, il y a de quoi faire avec 239 milliards de recettes par an. Mais ce n’est toujours pas assez pour couvrir les 313 milliards de dépenses…

Poids de la dette, taux d’intérêts, faiblesse des pouvoirs publics… Nous entendons à longueur de journée des discours pointant nos faiblesses économiques. A écouter l’ensemble des informations, la France n’aurait pas un sou. C’est faux ! Le budget de la France est déjà conséquent. Certains crient à la mauvaise répartition. Avons-nous conscience de toute l’action étatique ? En tout cas, il y a de quoi faire avec 239 milliards de recettes par an. Mais ce n’est toujours pas assez pour couvrir les 313 milliards de dépenses…

Oui, vous avez bien lu, 2016, c’est presque 74 milliards de déficit… Cela représente près de 31 % des recettes de 2016. Que cela signifie ?

Le rôle de l’État, c’est-à-dire l’ensemble des collectivités publiques nationales, dans l’économie d’un pays fait débat. Certains économistes sont plutôt favorables à un État neutre ou, au contraire, à un État interventionniste, fortement impliqué dans les sphères économique et sociale.

En France, au début du XIX     siècle, en réaction à l’absolutisme royal, les économistes libéraux dits “classiques”, comme Adam Smith, ne prêtaient à l’État, pour l’essentiel, que des fonctions régaliennes (diplomatie, sécurité extérieure et intérieure, justice). Le marché tendant naturellement à s’autoréguler, le “laisser-faire, laisser-passer”, sous l’égide d’un État protecteur de la libre concurrence, et donc la suppression des barrières aux échanges et à la libre concurrence, devaient conduire à une répartition optimale des ressources.

Cependant, les développements de la science économique, les mutations des économies de marché, et les événements marquants du XXe siècle ont progressivement confié de nouveaux rôles à l’État.

L’État est donc devenu le « gendarme des marchés » avec ce souci de promouvoir une concurrence équitable et d’éviter une concentration excessive des activités économiques et de protéger l’information et la liberté de choix des consommateurs.

Par ailleurs, l’État intervient, par le biais de taxes, de subventions ou de réglementations, sur des effets négatifs comme la pollution, ou positifs comme la recherche. Il finance également par l’impôt certains biens ou services, comme les biens publics tels que l’éclairage des rues, qui ne pourraient être spontanément produits par le marché.

A cause des économies caractérisées par la rigidité des prix et par l’incertitude, un chômage élevé apparaît. Là encore, l’État soutient la croissance et stimule l’économie afin de tenter de parvenir au plein-emploi, notamment par des politiques conjoncturelles de relance de la demande et en engageant des dépenses publiques supplémentaires.

L’État est donc ainsi devenu un producteur, au travers notamment des entreprises publiques, l’employeur de plus d’un quart des salariés et un consommateur important, via les marchés publics, pour trois grandes « missions » : allocation des ressources, stabilisation de l’économie et redistribution.

Ce rôle central de l’État peut être problématique :

  • en premier lieu, la légitimité de l’action de l’État est remise en cause car l’action publique répond parfois davantage aux intérêts électoraux ou personnels des décideurs publics (responsables politiques, fonctionnaires) qu’à l’intérêt général ;
  • en second lieu, l’État n’a pas la possibilité de « lire l’avenir ». Il n’a pas la possibilité de prévoir quel secteur sera émergent. De plus, l’Etat fait déjà face aux poids grandissants de la sécurité sociale, des retraites, de la dette…
  • enfin, car la mondialisation et la construction européenne ont obligé l’État à renoncer à certains outils de contrôle, comme le contrôle des changes, le blocage des prix ou l’encadrement du crédit.

Malgré tout, les attentes à l’égard de l’État n’ont pas diminué. Il assure donc certaines dépenses publiques (avec les collectivités territoriales) comme :

  • les dépenses de fonctionnement, qui servent à la bonne marche des services publics sans y apporter d’amélioration (dépenses courantes de personnel et d’entretien) ;
  • les dépenses de transfert en nature, principalement la fourniture de services publics comme l’hospitalisation ou l’enseignement à titre gratuit, ou en numéraire (ex : subventions aux entreprises, pensions de retraite, allocations familiales, minima sociaux…) ;
  • les dépenses d’investissement, qui visent à renouveler ou à accroître le capital public (ex : achats de matériels et de mobiliers, constructions de bâtiments et d’infrastructures).

Voilà comment a évolué la place de l’Etat et de ses dépenses dans notre économie depuis 1993.
Dépenses et recettes publiques entre 1993 et 2015

en points de PIB

Déficit public

Dépenses publiques

Recettes publiques

1993

-6,3

54,6

48,3

1994

-5,4

54,0

48,6

1995

-5,1

54,1

49,0

1996

-3,9

54,3

50,4

1997

-3,6

53,9

50,3

1998

-2,4

52,3

49,9

1999

-1,6

52,0

50,5

2000

-1,3

51,1

49,8

2001

-1,4

51,2

49,8

2002

-3,1

52,3

49,2

2003

-3,9

52,8

48,9

2004

-3,5

52,5

49,0

2005

-3,2

52,9

49,7

2006

-2,3

52,5

50,2

2007

-2,5

52,2

49,7

2008

-3,2

53,0

49,8

2009

-7,2

56,8

49,6

2010

-6,8

56,4

49,6

2011

-5,1

55,9

50,8

2012

-4,8

56,8

52,0

2013

-4,0

57,0

52,9

2014

-4,0

57,3

53,4

2015

-3,6

57,0

53,5

Évidemment, le bilan est lourd. Le cumul de tous ces résultats déficitaires nous amènent aux records actuels de dettes.

L’État providence

La structure des dépenses est multiple. Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche et Sécurité sociale sont les principaux pôles de dépenses. Ainsi, les dépenses régaliennes traditionnelles comme la diplomatie, la défense, la police et la justice ne représentent plus qu’un cinquième du budget de l’État, et moins d’un dixième des dépenses publiques contre plus de la moitié au début du 20e siècle. Par ailleurs, les dépenses des administrations de Sécurité sociale, inexistantes il y a un siècle, dépassent celles de l’État depuis 1995.

Les dépenses de l’État ne sont pas présentées par postes de dépenses mais classées par mission. Le budget général de l’État compte 31 missions dans la loi de finances initiale (LFI) 2016, pour un total de 413,8 milliards d’euros (Md€) en autorisations d’engagements et 406,3 Md€ en crédits de paiements.

Manier les chiffres du budget de l’Etat, ce n’est pas si simple. Dans un premier temps, il faut savoir que les chiffres annoncés dans le projet de loi de finances ne sont pas corrigés par rapport au budget réalisé.

Certaines lignes de budgets, comme les 108 milliards de remboursements et dégrèvements, ne sont pas indiquées… Il est d’ailleurs utile de préciser que ce phénomène de non-concordance des données n’est pas nouveau

Nous avons donc pris soin de comparer les données de l’INSEE (budget réalisé) par rapport au projet de loi de finance. Les résultats sont surprenants.
31 MISSIONS (crédits de paiement  en milliards  d’euros – hors contributions directes  de l’État  au CAS Pension)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Autorisations d’engagement

Variations 2016/2017

2015

2016

2015

2016

PLF 2017

Action extérieure de l’État

3,1

3,1

3

3,2

2,88

-10,00 %

Administration générale et territoriale de l’État

2,7

2,5

2,8

2,5

2,32

-7,20 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3,1

2,8

2,9

2,7

3,12

15,56 %

Aide publique au développement

2,5

2,1

2,8

2,6

2,62

0,77 %

Anciens combattants, mémoire, liens avec la nation

2,8

2,6

2,7

2,6

2,55

-1,92 %

Culture

2,6

2,8

2,6

2,7

2,70

0,00 %

Défense

46,6

45,4

36,9

39,6

32,44

-18,08 %

Direction de l’action du Gouvernement

1,3

1,5

1,2

1,3

1,37

5,38 %

Écologie, développement et mobilité durables

7,9

7,2

7,3

7,1

8,99

26,62 %

Égalité des territoires et logement

13,7

18,2

13,4

17,9

18,11

1,17 %

Engagements financiers de l’État

46,6

45,1

45,2

45,2

0,57

-98,74 %

Enseignement scolaire

66,3

67

66,4

67,1

50,06

-25,39 %

Gestion des finances publiques et ress.humaines

11,4

11

11,3

10,9

8,17

-25,05 %

Justice

9,2

8,3

7,9

8

6,89

-13,88 %

Outre-mer

2,1

2,1

2,1

2,1

2,03

-3,33 %

Recherche et enseignement supérieur

25,8

26

26

25,9

26,75

3,28 %

Régimes sociaux et de retraite

6,4

6,3

6,4

6,3

6,25

-0,79 %

Relations avec les collectivités territoriales

2,7

3,8

2,7

3

3,14

4,67 %

Remboursements et dégrèvements

99,3

100

99,3

100

108,86

8,65 %

Santé

1,2

1,3

1,2

1,3

1,26

-3,08 %

Sécurité

18,2

18,5

18,2

18,4

12,98

-29,46 %

Solidarité, insertion et égalité des chances

15,8

18,2

15,8

18,3

17,65

-3,55 %

Travail et emploi

11,5

11,3

11,3

11,4

15,30

34,21 %

Autres missions

7,8

6,5

6,2

6

6,22

3,67 %

Totaux

411

414

396

406

343,23

-15,52 %

Pour votre information, les “autres missions” sont reportées dans le tableau ci-dessous. Les 31 missions ne comprennent pas la nouvelle mission “investissement d’avenir” créée en 2017.
Détail des autres missions : autorisations d’engagement
    PLF 2017
Conseil et contrôle de l’État    0,51
Crédits non répartis *    0,02
Économie    1,64
Immigration, asile et intégration    1,06
Médias, livre et industries culturelles    0,57
Politique des territoires    0,69
Pouvoirs publics    0,99
Sport, jeunesse et vie associative    0,74

Alors pourquoi constate-t-on des variations de budget aussi importantes ? La création du projet de loi de finances se prépare dès le printemps de l’année précédente. Aussi, les chiffres en possession de Bercy s’arrêtent au précédent exercice. Pour rester simple, on fait des projections avec des projections.
On comprend donc aisément que les propos tenus dans les débats, discours ou même documents officiels se contredisent régulièrement.
Comment a été conçu le budget 2017 ?
Le budget 2017 a donc été établi à partir de chiffres 2015 et 2016 inexactes. Ce n’est d’ailleurs pas vraiment le problème. Il vaut mieux disposer rapidement de projections chiffrées plutôt que d’attendre un budget définitif deux ans plus tard.
C’est plutôt le contexte qui donne matière à débat. L’Etat se veut rassurant pour générer de la croissance par la confiance et surestime donc un peu les chiffres. La croissance de 1,5 % prévu pour 2016 se solde par un petit 1,1 %, la confiance est difficilement accordée quand les estimations sont trop optimistes.
Finalement, au regard de toutes les actions de l’Etat, les médias ne s’emparent que d’une infime fraction du rôle de l’Etat.
Nous vous proposons un tour d’horizon de ce qui compose les 31 missions de l’Etat. Les budgets de chaque mission sont téléchargeables à la fin du dossier.
Vous allez être surpris de l’amplitudes des missions de l’État.

Par Publié le : 10 mai 2017Catégories : Economie, Gestion et Finance0 Commentaire