Budget public rime avec politique, emprunt public rime avec déficit. La tendance est à l’inversion de la courbe ! Nous ne réduisons par encore le montant de la dette, mais nous produisons plus de richesse que nous empruntons, donc, nous réduisons le pourcentage de dette par rapport à notre PIB. Vous avez suivi ?

Il est évident que l’Etat doit recourir à l’emprunt. Encore faut-il équilibrer l’économie, c’est à ce jeu de funambule que se prêtent tous nos présidents depuis de Gaulle. A la fin du 3e trimestre 2016, la dette française s’établit à 2 160,4 milliards d’euros, soit 97,6 % du PIB.

Idéalement, l’État doit pouvoir emprunter afin d’améliorer les conditions de vie des populations et d’orienter le pays sur des choix stratégiques. Par exemple, pour passer du “tout automobile” à un développement massif des transports collectifs, pour développer les énergies renouvelables, ou pour construire des bâtiments publics et des logements sociaux moins énergivores.

Principaux ratios de finances publiques en % du PIB

Principaux ratios de finances publiques

2011

2012

2013

2014

Déficit public notifié 1

-5,1

-4,8

-4,1

-3,9

Dette publique notifiée 1

85,2

89,6

92,3

95,6

Dette publique nette 2

76,9

80,6

83,5

86,7

Recettes publiques

50,8

52,0

52,9

53,6

Dépenses publiques

55,9

56,8

57,0

57,5

Prélèvements obligatoires 3

42,6

43,8

44,7

44,9

1. Au sens du traité de Maastricht.

2. Dette publique notifiée diminuée de certains éléments d’actif.

3. Le taux de prélèvements obligatoires est calculé hors crédits d’impôt, alors que le  classement des crédits d’impôt en dépenses, en base 2010, accroît les taux des recettes et dépenses publiques.

Comment fait l’Etat pour emprunter ?

Pour se financer, contrairement à des entreprises ou des ménages qui s’endettent via le crédit bancaire, les collectivités publiques émettent des titres sur les marchés financiers, que des investisseurs achètent. C’est l’Agence France Trésor (AFT) qui est chargée de la gestion de la dette et de la trésorerie de l’État. L’AFT met aux enchères les obligations qu’elle émet : c’est que l’on appelle les adjudications.

L’Etat émet trois types de produits :

  • des titres à court terme, les bons du Trésor à intérêt annuel (BTAN),
  • des titres d’une durée de deux ou cinq ans et les bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF),
  • des titres de moyen et long terme, les obligations assimilables au trésor (OAT).

Qui détient la dette française

C’est un secret bien gardé, il n’existe pas d’information publique détaillée sur la décomposition des détenteurs de la dette de la France. Selon l’AFT, fin mars 2015, 64,4 % des détenteurs de la dette publique française sont des « non-résidents ». La notion de « non-résident » est floue.

La dette publique française est donc essentiellement placée sur les marchés financiers internationaux, ce qui est une caractéristique particulière de la France et de la zone euro dans son ensemble.

Les collectivités territoriales empruntent aussi

Les collectivités territoriales disposent d’une liberté pleine et entière pour recourir à l’emprunt. Cela concerne les communes, les départements et les régions. Le code général des collectivités territoriales précise que le produit des emprunts peut constituer l’une des recettes non fiscales de la section d’investissement du budget des collectivités. Les emprunts correspondent au volume global des dettes contractées à plus d’un an pendant l’exercice.

Les emprunts sont exclusivement destinés à financer des investissements, qu’il s’agisse d’un équipement spécifique, d’un ensemble de travaux relatifs à cet équipement ou encore d’acquisitions de biens durables considérés comme des immobilisations. Les emprunts n’ont pas à être affectés explicitement à une ou plusieurs opérations d’investissement précisément désignées au contrat. Ils peuvent être globalisés et correspondre à l’ensemble du besoin de financement de la section d’investissement.

En aucun cas l’emprunt ne doit combler un déficit de la section de fonctionnement ou une insuffisance des ressources propres pour assurer l’amortissement de la dette. Egalement, les dépenses imprévues inscrites à la section d’investissement du budget ne peuvent être financées par l’emprunt.

Dette publique notifiée

Principaux ratios
de finances publiques

Au 31 décembre 2013

Au 31 décembre 2014

en milliards d’euros

en % du PIB

en milliards d’euros

en % du PIB

État

1 535,9

72,6

1 610,2

75,5

Odac

22,6

1,1

22,6

1,1

Administrations locales

183,3

8,7

188,2

8,8

Administrations de sécurité sociale

211,7

10,0

216,8

10,2

Total des administrations publiques

1 953,4

92,3

2 037,8

95,6

Pourquoi emprunte-t-on ?

La France emprunte tous les jours sur les marchés pour payer ses fonctionnaires. Bien que les règles imposées aux collectivités soient les mêmes pour l’Etat, ce dernier mélange fonctionnement et investissement dans ses comptes et budgets. Il est donc extrêmement difficile de relier les recettes et les dépenses.

La France paye des salaires de fonctionnaires avec de l’emprunt. Finalement, cette situation installée devient ingérable pour les nouveaux chefs d’Etat qui « remettent à plus tard » le problème. L’État n’a pas les moyens d’assumer ses dépenses simplement parce qu’elles dépassent ses recettes de 70 milliards. Les dépenses de personnel représentent 40 % de son budget général, c’est neuf fois le montant qu’il consacre aux investissements. Les seuls en théorie qui devraient être financés par l’emprunt.

Pour une entreprise, emprunter pour renforcer sa trésorerie est une bonne chose quand les taux d’intérêts sont bas. L’entreprise dispose alors d’un levier plus important pour réaliser plus de volume et, si le pari pris est le bon, plus de résultat. L’emprunt est donc moteur de l’économie et levier de croissance.

Pour un particulier, l’emprunt permet d’accéder au logement, d’être véhiculé. Le tout est de s’assurer de conserver ses capacités à rembourser la dette contractée.

L’Etat français peut emprunter tant qu’il reste solvable et que la confiance qu’ont les prêteurs dans l’état est grande. Le fait que la dette nationale soit détenue par des acteurs étrangers est un atout autant qu’une faiblesse. C’est une preuve de l’attractivité du territoire national et de la confiance qu’il obtient auprès des marchés, illustrée par les notes élevées délivrées par les trois plus grandes agences de notation d’obligations nationales, Moody’s (Aa1), Fitch (AA+) et Standard & Poor’s (AA).

La France emprunte actuellement à des taux records historiquement bas. C’est donc le meilleur moment pour emprunter mais il faut faire extrêmement attention aux taux de remboursements. L’idéal serait d’emprunter pour augmenter la capacité de financement française en l’étalant dans le temps. Faire des réserves, tout simplement.

Attention également, un taux élevé de dette détenue par des non-résidents signifie aussi que le pays est sensible à la conjoncture internationale. La Grèce ou le Portugal, qui avaient également une dette majoritairement située à l’étranger, en ont ainsi payé les conséquences pendant la crise des dettes souveraines. Les craintes de leurs créanciers, à l’idée que ces pays ne puissent honorer leur dette et les intérêts qui vont avec, avaient alors provoqué une explosion des taux d’intérêt, et des difficultés d’autant plus grandes pour ces pays, à emprunter sur les marchés financiers.