Depuis la réforme constitutionnelle de 2003, le statut des DOM-TOM a été modifié en France. Les DOM sont devenus techniquement des DROM (pour «Département et région d’Outre-mer ») et les TOM ont disparu, sauf pour les Terres australes, afin de faire place aux COM (pour «Collectivité d’Outre-mer »). Pour l’Union Européenne, Régions ultrapériphériques (RUP) ou Pays et Territoires d’Outre-mer  (PTOM), sont des territoires ultramarins, présentant des ressources formidables, qu’elle intègre ou qu’elle associe (I). Ils ont chacun leur histoire propre et certains acquièrent de plus en plus d’autonomie dans leur gestion. La Nouvelle-Calédonie est d’ailleurs à l’aube d’un référendum… (II).

I. L’Outre-mer français et l’Union Européenne

Les territoires ultramarins font l’objet d’une construction institutionnelle fondée sur la Constitution française (A) et sur le traité de Rome et le traité sur le fonctionnement de l’UE  (B).

A. DROM et COM,  les structures de la France d’Outre-mer se sont modifiées

Un  peu d’histoire institutionnelle des Outre-mer  (1) pour comprendre comment les rapports entre la France et ses territoires ultramarins évoluent et donner un éclairage sur le processus de décentralisation en France qui a pris, dans certaines collectivités la forme inédite de la collectivité territoriale unique (2).

1. Lois et réformes constitutionnelles

Après la loi « de départementalisation » du 19 mars 1946, transformant les quatre « vieilles colonies » de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La Réunion en départements « d’Outre-mer  » (DOM), la Constitution du 27 octobre 1946 consacra la disparition des colonies avec la création des territoires d’Outre-mer  (TOM), et des Etats associés, formant avec la République, l’Union française.

La Constitution du 4 octobre 1958, Ve République française conserva les deux catégories DOM et TOM, et créa le statut d’Etat de la Communauté française. Les DOM soumis aux dispositions de l’article 73 de la Constitution, étaient régis par le principe de l’assimilation adaptée, de la loi de départementalisation de 1946. Les TOM étaient régis par les articles 74 à 76 de la Constitution ayant « une organisation particulière tenant compte de leurs intérêts propres dans l’ensemble des intérêts de la République » ; La Communauté devait succéder à l’Union française, elle était composée des anciens territoires d’Afrique et de Madagascar qui avaient choisi le statut d’Etat au référendum de 1958 – à l’exception de la Guinée, qui opta pour l’indépendance immédiate. Avec la décolonisation, ces Etats acquirent la souveraineté et la Communauté cessa d’exister.

Le statut des quatre DOM de la loi de 1946 est resté inchangé ; Saint-Pierre-et-Miquelon1 a été transformée en DOM par la loi du 19 juillet 1976, puis en collectivité territoriale d’Outre-mer à statut spécial – un régime voisin de celui des TOM – par une loi du 11 juin 1985. Lors de l’indépendance des Comores, Mayotte fut également érigée en collectivité territoriale d’Outre-mer à statut spécial par la loi du 24 décembre 1976.

Réforme constitutionnelle de 2003 :

La loi constitutionnelle1 n°2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République a confirmé le principe de libre administration des collectivités territoriales qui était déjà présent dans la Constitution. L’article 72 énonce ainsi ce principe « Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d’outre-mer […]. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi […]. Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences ».  Le titre XII fait l’objet d’une réécriture complète. Il  comprend les dispositions applicables à l’Outre-mer, à l’exception de la Nouvelle-Calédonie, régie par le titre XIII. Cette loi autorise les collectivités d’outre-mer à choisir leur statut. L’ancienne division entre DOM et TOM disparaît par la création de l’article 72-3 de la Constitution qui synthétise la répartition entre DROM et COM. La loi constitutionnellen° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République a modifié l’article 72-3 pour rajouter « Saint-Barthélemy3, Saint-Martin3, » et «Clipperton », ce qui donne la configuration actuelle :

  1. Saint-Pierre-et-Miquelon est passée successivement du statut de TOM à celui de département d’Outre-mer (DOM) en 1976, à celui de collectivité à statut particulier en 1985, avant d’acquérir celui de COM en 2007 ;
  2. Les lois constitutionnelles (art. 89) modifient la Constitution. Elles sont adoptées, après une procédure législative spécifique, soit par le Congrès soit par référendum alors que les lois organiques (art. 46) précisent et appliquent des articles de la Constitution qui y renvoient expressément.
  3. Depuis 1945, le franc CFP (colonies françaises du Pacifique) est la monnaie des territoires d’Outre-mer de l’océan Pacifique (Polynésie française, Wallis-et-Futuna) et de la Nouvelle-Calédonie. Après la colonisation de ces îles en 1880, la monnaie officielle était le même franc qu’en métropole.

DROM : Les départements (DOM) et/ou les régions d’Outre-mer (ROM) sont  La Guadeloupe, La Guyane, La Martinique, La Réunion et Mayotte.

Ils sont régis par le principe d’assimilation législative de l’article 73 de la Constitution française qui dispose «Dans les départements et les régions d’Outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit ». Dans ce régime, le droit commun est donc le principe, et l’existence d’un droit spécifique ou dérogatoire constitue l’exception.

COM : Les collectivités d’Outre-mer (COM) sont soumises au principe modulable de spécialité législative, tel qu’il est prévu à l’article 74 de la Constitution française et comprennent d’anciens territoires d’Outre-mer  (TOM) et d’autres entités françaises d’Outre-mer ayant un statut particulier, qui sont devenus COM par la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003. Chacune des COM est soumise à un statut qui doit être adopté par voie de loi organique. En tant que parties intégrantes de la République française, les COM sont aussi représentées à l’Assemblée Nationale, au Sénat, au Conseil économique et social et utilisent l’euro comme monnaie. Les Collectivités du Pacifique utilisent le franc CFP3,  une monnaie indexée sur l’euro, tandis que les COM de l’Atlantique utilisent l’euro. Sont érigées en collectivités d’Outre-mer  (COM) par la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007, La Polynésie française, Saint-Barthélémy (une île des petites Antilles), Saint-Martin (partie nord de l’île de Saint-Martin dans les petites Antilles), Saint-Pierre et Miquelon4 (archipel français dans l’océan atlantique au sud de l’île canadienne  de Terre neuve). Wallis-et-Futuna5 devenu Territoire d’Outre-mer  en 1961, évolue vers le statut de COM. Le territoire de ces deux îles a  encore actuellement le statut de TOM.

Restent en dehors de ces deux régimes, la Nouvelle-Calédonie et les TAAF (Les Terres australes et antarctiques françaises).

2. La collectivité unique issue de la réforme constitutionnelle de 2003

Cette loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a également donné aux départements et régions d’Outre-mer, la possibilité de se doter d’une collectivité unique exerçant les compétences départementales et régionales. Ainsi en dispose le 5e alinéa de l’article 73 de la Constitution « La création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités. ».

En décembre 2003, des référendums étaient organisés en Guadeloupe et en Martinique. Les électeurs devaient se prononcer sur la création d’une collectivité territoriale unique. Près de 73% d’entre eux votèrent contre ce projet en Guadeloupe et 50,5% en Martinique.

En 2010, de nouvelles consultations eurent lieu, cette fois en Guyane et en Martinique. Après avoir rejeté, le 10 janvier, une transformation en collectivité d’Outre-mer, les électeurs approuvèrent, le 24 janvier, la création d’une collectivité unique. La loi du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique crée ces deux nouvelles collectivités et leurs institutions : l’Assemblée de Guyane et l’Assemblée de Martinique. Ces collectivités sont régies par une septième partie du code général des collectivités territoriales créée par la même loi. Après des élections territoriales organisées en décembre 2015, en même temps que les élections régionales, ces deux collectivités territoriales uniques sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016.

Mayotte : Cette île française de l’archipel des Comores depuis 1841 et “collectivité départementale” depuis juillet 2001, est devenue en 2011, une collectivité territoriale unique, le 101e département français.

La Corse : En application de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République notre), la Corse est devenue le 1er janvier 2018 une collectivité unique, fusionnant l’actuelle collectivité territoriale de Corse et les départements de Corse du Sud et de Haute-Corse.

3. Depuis 1945, le franc CFP (colonies françaises du Pacifique) est la monnaie des territoires d’Outre-mer  de l’océan Pacifique (Polynésie française, Wallis-et-Futuna) et de la Nouvelle-Calédonie. Après la colonisation de ces îles en 1880, la monnaie officielle était le même franc qu’en métropole.

4. Saint-Barthélémy et Saint-Martin sont passées du statut de communes du département de la Guadeloupe dans les Antilles à celui de COM créé par la loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’Outre-mer  et de façon effective en juillet 2007 à l’occasion de leur première réunion de son Conseil Territorial.

5. Wallis et Futuna : Wallis-et-Futuna devient Territoire d’Outre-mer  par la loi statutaire du 29 juillet 1961, adoptée à la suite d’un référendum, par lequel la quasi-unanimité de la population choisit en 1959 d’intégrer la République française. Ce « statut de 1961 » reconnaît l’existence d’institutions coutumières, aux côtés de celles de la République. Il n’a pas fait l’objet de modifications majeures depuis son adoption. La refonte de la loi du 29 juillet 1961, rendue nécessaire par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 et l’évolution vers le statut de Collectivité d’Outre-mer , n’a toujours pas donné lieu à l’adoption d’une loi organique, faute de consensus sur la nouvelle répartition des pouvoirs et la place des autorités coutumières.

B. RUP et PTOM, l’Europe dans les Outre-mer

L’Union européenne (UE) est présente sur l’ensemble des continents par le biais des territoires éloignés appartenant à ses Etats membres. Deux formes de relations avec l’Union européenne existent. Les régions ultrapériphériques (RUP) (1) et les Pays et Territoires d’Outre-mer (PTOM) (2)

1. Les Régions Ultrapériphériques (RUP)

L’article 349 (TFUE) liste les neuf Régions Ultrapériphériques de l’Union Européenne dont font partie les départements français d’Outre-mer  (Martinique, Guadeloupe, Saint-Martin, Guyane, Réunion et Mayotte (le statut de Mayotte a été modifié suite à la décision 2012/419/UE du Conseil européen devenant ainsi une nouvelle région ultrapériphérique à compter du 1er janvier 2014).

Les RUP possèdent des atouts uniques dont l’Union européenne peut bénéficier. Elles constituent une présence européenne sur des zones stratégiques du globe et disposent de caractéristiques géographiques et géologiques exceptionnelles qui en font des laboratoires privilégiés pour la recherche et l’innovation dans des secteurs d’avenir tels que la biodiversité et les écosystèmes terrestres et marins, la pharmacologie (grâce à la présence de plantes présentant des molécules et substances actives utilisables par l’industrie pharmaceutique), les énergies renouvelables, les sciences de l’espace (centre spatial guyanais est la principale base de lancement de satellites et fusées de l’Union européenne).

Les RUP font partie intégrante de l’Union Européenne et sont par conséquent, soumises à la législation de l’UE ainsi qu’à tous les droits et obligations attachés à l’adhésion à l’UE, sauf dans les cas où des mesures spécifiques ou dérogatoires sont prévues. Conformément à l’article 349 (TFUE), ces mesures spécifiques ont été mises en place pour pallier les contraintes auxquelles doivent faire face ces régions, comme l’éloignement, l’insularité, une faible superficie, des conditions topographiques et climatiques difficiles et une dépendance économique vis-à-vis d’un petit nombre de produits. Les régions ultrapériphériques bénéficient des subventions de la politique de cohésion par le biais du Fonds européen de développement régional et du Fonds social européen.  Un critère utilisé « le PIB par habitant inférieur à 75% du PIB moyen de l’UE à 27 ».

Dans l’arrêt « Mayotte » du 15 décembre 2015, la Cour de Justice de l’Union européenne a précisé la portée de cette distinction qui autorise l’adaptation des politiques et législations de l’UE en faveur des régions ultrapériphériques.

Selon l’article 349 du traité (TFUE), les mesures dont les RUP bénéficient, portent notamment sur les politiques douanières et commerciales, la politique fiscale, les zones franches, les politiques dans les domaines de l’agriculture et de la pêche, les conditions d’approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité, les aides d’État, et les conditions d’accès aux fonds structurels et aux programmes horizontaux de l’Union. 

Que sont ces Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) ?

Il existe désormais un ensemble unique de règles régissant les cinq Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) : Règlement (UE) 1303/2013, règlement portant dispositions communes (RPDC) pour le Fonds structurel et d’investissements européen et qui a introduit des règles s’appliquant aux cinq Fonds.

La période de programmation 2014-2020 (stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive) a apporté un nouveau cadre législatif pour ces cinq Fonds, à savoir, le Fonds européen de développement régional (FEDER), le Fonds social européen (FSE ), le Fonds de cohésion, le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER),  le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP).  Ces fonds ESI relèvent de la politique de cohésion de l’UE, de la politique agricole commune et de la politique commune de la pêche. 

Tous  les chiffres sur : http://www.europe-en-france.gouv.fr/Rendez-vous-compte/Chiffres

Les régions ultrapériphériques (RUP) bénéficient de quatre fonds structurels d’investissement européens (FESI) : FEDER et FSE (au titre de la politique de cohésion économique, sociale et territoriale), FEAMP (au titre de la politique commune de la pêche et de la politique maritime intégrée), FEADER (au titre du pilier II de la Politique agricole commune).

S’articulant avec le fonds FEADER, dans le domaine agricole, le POSEI (programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité), qui décline le premier pilier de la politique agricole commune (PAC) dans les régions ultrapériphériques (RUP), fixe comme objectifs l’amélioration de l’approvisionnement des RUP en produits agricoles essentiels, ainsi que le maintien des filières historiques d’export et l’amélioration de l’auto-approvisionnement local par le soutien des productions de diversification.

Le programme POSEI comprend deux volets :

  • Le régime spécifique d’approvisionnement (RSA) : destiné à permettre d’alléger le coût de certains approvisionnements nécessaires aux productions agricoles et agro-industrielles des DOM.
  • Les mesures en faveur des productions agricoles locales (MFPAL) : Les MFPAL visent à développer, à conforter, à soutenir le développement de la diversification de l’agriculture locale.

Dans le domaine de la pêche,les RUP bénéficient également du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche.

Les spécificités des RUP sont aussi reconnues en ce qui concerne la réglementation des aides aux entreprises au moyen de ressources publiques pour le développement des PME et TPE. En matière de fiscalité, les RUP bénéficient de dispositions spécifiques en lien à leur réalité locale. On peut citer notamment les aides fiscales et le « différentiel d’octroi de mer » (qui vise à soutenir la production  locale) pour les produits des RUP.

Concernées par l’ensemble des politiques européennes, les RUP sont plus particulièrement impactées par la politique de cohésion. Celle-ci vise à réduire les écarts de richesse et de développement entre les régions de l’Union. Dans ce domaine, les RUP font partie de la catégorie des « régions les moins développées » de l’Union. Une qualification donnée en fonction de critères économiques et sociaux (taux de chômage, PIB de la région…), qui leur permet de bénéficier de dotations plus importantes des fonds européens structurels et d’investissement (FESI).

Les fonds européens sont gérés localement par des autorités de gestion désignées par décision du Premier ministre. Ainsi, les préfectures et les collectivités locales sont les principales interlocutrices des porteurs de projets des RUP.  Le taux de cofinancement des projets, c’est-à-dire la participation financière de l’Union européenne, est également alors plus élevé que dans les régions métropolitaines et peuvent atteindre 85%. Les critères de sélection sont fonction des programmes opérationnels regroupant une grande variété de domaines : recherche et innovation, environnement, transition numérique, emploi, développement durable, énergie, aides aux entreprises.

Par ailleurs, le fonds européen de développement régional (FEDER) prévoit une allocation additionnelle spécifique destinée notamment à couvrir les surcoûts liés à l’ultrapériphéricité : transports, mises aux normes parasismiques ou anticycloniques des bâtiments publics.

Quelques exemples de projets financés, de la mise aux normes parasismiques d’une clinique à l’achat de matériel médical de lutte contre le cancer, les fonds européens financent un grand nombre de projets.

Sur la période 2007/2013, 6 355 projets ont été cofinancés. Sur la période 2007-2010, la clinique de Basse-Terre (Guadeloupe), située en zone sismique, a été rénovée afin de respecter les normes parasismiques. Ce sont près de 3,8 millions d’euros qui ont été apportés par le FEDER pour assurer une meilleure protection du personnel hospitalier et des patients.

Pour 2014/2020, ce sont déjà 1420 projets qui ont été programmés. Depuis juin 2016, Mayotte reçoit plus de 40 000 euros du FSE pour financer la création d’entreprises par des femmes mahoraises, grâce à un suivi personnalisé (tutorats, formations) et un accompagnement financier. Les villages d’Antecume-Pata, Twenké-Taluen, Cayodé et Elabé de l’ouest guyanais, habités par des populations amérindiennes, sont équipés aujourd’hui de panneaux photovoltaïques financés par le FEADER à hauteur de 900 000 euros, renforçant ainsi l’accès à l’énergie de territoires enclavés, difficiles d’accès.

De plus, les RUP sont très impliquées dans les programmes de coopération territoriale (INTERREG) cofinancés par le FEDER, qui constituent pour elles un instrument pour renforcer leur intégration régionale. Le programme « Caraïbes » entre la Martinique, la Guadeloupe, Saint-Martin, la Guyane et associant les États de la zone Caraïbes en est un exemple. Il a permis la construction d’un radar au large de Saint-Martin pour mieux gérer le trafic maritime, ce programme est présent cependant dans une multitude de domaines : économie, agriculture, recherche, infrastructures et dépend des appels à projets organisés régulièrement.

Par ailleurs, le programme « Horizon 2020 » pour la recherche et développement constitue une opportunité de développement pour ces régions, dont la position géographique favorise le développement de projets de recherche et d’innovation, notamment dans les énergies renouvelables, l’espace, l’agriculture, la mer et la biodiversité.

2. Les pays et territoire d’Outre-mer  (PTOM)

Les PTOM sont les 21 pays et territoires énumérés à l’annexe II du Traité CE. Ils ne sont pas indépendants mais sont liés à un des Etats membres cités dans l’article 198 du TFUE qui dispose “Les États membres conviennent d’associer à l’Union les pays et territoires non européens entretenant avec le Danemark, la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni des relations particulières..  Les PTOM français sont la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Pierre et Miquelon, Saint Barthélémy, les Terres australes et antarctiques française et Wallis et Futuna. Les Etats membres de rattachement sont responsables des affaires régaliennes au sein des PTOM : défense, affaires étrangères, justice, sécurité intérieure…

Le statut de « pays associés » des PTOM

Contrairement aux régions ultrapériphériques, les PTOM ne font pas partie intégrante de l’Union européenne et ne sont pas soumis au droit européen. Néanmoins, ils sont « associés » à l’Union européenne au nom des relations particulières qu’ils entretiennent avec un Etat membre. Leurs ressortissants possèdent la citoyenneté européenne et sont, à ce titre, électeurs et éligibles aux élections européennes.Cette association, définie par les articles 198 à 204 du TFUE, se traduit par une décision d’association Outre-mer (DAO). Adoptée le 25 novembre 2013 et applicable jusqu’au 31 décembre 2020, ladernière DAO met en exergue trois objectifs, la promotion de la coopération, la lutte contre la vulnérabilitéetla compétitivité.

Comme l’indique l’article 198 du TFUE « Le but de l’association est la promotion du développement économique et social des pays et territoires, et l’établissement de relations économiques étroites entre eux et l’Union dans son ensemble. Conformément aux principes énoncés dans le préambule du présent traité, l’association doit en premier lieu permettre de favoriser les intérêts des habitants de ces pays et territoires et leur prospérité, de manière à les conduire au développement économique, social et culturel qu’ils attendent ». Ainsi, les intérêts des PTOM sont pris en compte dans les négociations commerciales menées par la Commission. Les produits originaires des PTOM importés dans l’Union européenne ne sont pas soumis aux droits de douane ni aux restrictions quantitatives. Ce régime est non réciproque.

Le texte insiste sur la nécessaire coopération des PTOM avec leurs voisins et le rôle pivot que les PTOM peuvent jouer dans leurs régions. Cette nouvelle “décision d’association Outre-mer” (DAO), entrée en application en janvier 2014, marque aussi le début d’un nouveau système de commerce. Les PTOM bénéficient du régime applicable aux partenaires commerciaux les plus favorisés : conditions d’échanges avantageuses en matière de services et d’établissement, accès au marché des biens de l’UE en franchise de droits et sans contingent. Les conditions d’accès au marché de l’UE ont également été révisées conformément à la décision d’association, laissant entrevoir davantage de possibilités d’exportation pour les PTOM.

Fonds Européen de Développement (FED)

Les PTOM sont bénéficiaires du fonds européen de développement. Créé par le traité de Rome en 1957, le FED, financé par des contributions directes des États membres, est le principal instrument de l’aide européenne à la coopération et au développement en faveur des pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) et des PTOM.  La banque européenne d’investissement participe également au financement de projets en accordant des prêts avantageux.

En outre, les PTOM sont éligibles aux programmes horizontaux de l’Union européenne touchant des domaines aussi variés que l’éducation, la formation, la jeunesse et les sports (ERASMUS +), la recherche et l’innovation (HORIZON 2020), l’écologie et la biodiversité (BEST, LIFE), la culture et l’audiovisuel (Europe Creative) ou encore le soutien aux PME (COSME).

L’aide allouée à l’ensemble des PTOM de l’UE (hors Groenland) sur la période 2007-2013 s’est élevée à 286 millions d’euros. Sur la période 2014-2020, elle avoisine les 350 millions d’euros. Le budget du FED sur la période est de 30,5 milliards d’euros.

II. TRAITS D’HISTOIRE DE QUELQUES-UNES DES TERRES ULTRAMARINES FRANCAISES

Si Mayotte et La Polynésie française, sont DROM ou COM (1), la Nouvelle Calédonie et les TAAF ont des statuts à part (B).

A. Mayotte, Polynésie française, DROM/COM du bout du monde

De l’évolution de Mayotte notamment de son statut de COM à celui de DROM (1) à la Polynésie Française qui vient de se doter d’un nouveau Président (2).

1. Mayotte 

Mayotte est une île de l’archipel des Comores, situé au milieu du canal de Mozambique. Sa population est de 256 500 habitants (INSEE 2017). Mayotte est constituée de deux îles principales, Grande-Terre et Petite-Terre, et de plusieurs autres petites îles. Elle devient française en 1841. L’évolution du petit archipel est le résultat d’un long processus institutionnel de “départementalisation” au cours duquel les Mahorais ont toujours manifesté leur volonté de rester français. Lors du référendum sur la Constitution de 1958, les quatre élus mahorais de l’Assemblée territoriale des Comores avaient déjà déposé une motion réclamant la départementalisation. Puis, lors du référendum sur l’autodétermination des Comores organisé, île par île en décembre 1974, Mayotte souhaite rester attachée à la République française à une majorité de 63,8% des suffrages exprimés, les trois autres îles obtenant leur indépendance. Puis, lors d’un référendum organisé le 8 février 1976, 99,4% des électeurs votent le maintien de Mayotte au sein de la République française. Le Parlement prend acte de ce résultat en adoptant la loi du 24 décembre 1976 relative à l’organisation de Mayotte qui dispose, dans son article premier, que “Mayotte […] constitue une collectivité territoriale de la République française ».

Sur la base de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, Mayotte est inscrite à l’article 72-3 de la Constitution qui en fait une collectivité d’Outre-Mer (COM) régie par l’article 74 de la Constitution. La loi organique 21 février 2007 prépare le changement de statut en DROM. A partir 1er janvier 2008, Mayotte intègre le régime de l’identité législative, les textes législatifs et réglementaires s’appliquent de plein droit. La consultation des électeurs de Mayotte le 29 mars 2009 se traduit par un résultat de 95,2% pour la création d’une collectivité unique de l’article 73 de la Constitution, exerçant les compétences d’un département et d’une région d’outre-mer. La loi organique du 4 août 2009 tire les conséquences de ce vote en prévoyant la transformation de la « collectivité départementale de Mayotte » en « Département de Mayotte », à compter de mars 2011.

La loi simple et la loi organique du 7 décembre 2010 prévoient l’organisation et le fonctionnement de la collectivité. Elles fixent les conditions de passage à l’identité législative pour l’ensemble du droit, tout en prévoyant les adaptations et les dérogations dûment justifiées (par exemple, le droit social sera mis en œuvre selon un calendrier prévu dans le pacte pour la départementalisation). Le 31 mars 2011, après l’élection du Président du conseil général de l’assemblée renouvelée par moitié, Mayotte devient officiellement le 101ème département de France et son cinquième département d’outre-mer. Mayotte est désormais dotée d’un Conseil départemental. C’est également une Région UltraPériphérique (RUP) de l’Union européenne qui applique à ce titre, l’essentiel du droit de l’Union Européenne.

2. La Polynésie française      

      

La Polynésie française située au milieu du Pacifique sud à environ 6 000 kilomètres à l’est de l’Australie, se compose de 118 îles réparties en cinq archipels occupant une surface de 4000 km² (moins d’un centième de la surface de la France) et réparties sur une surface plus grande que l’Europe. Elle comprend les îles du Vent, les îles Sous-le-Vent, les îles Tuamotu, les îles Gambier, les îles Marquises et les îles Australes.

Sa population est de 275 918 habitants (INSEE 2017).

Les fondements du statut particulier de la Polynésie : La Constitution du 27 octobre 1946 fait de la Polynésie un territoire d’Outremer (TOM). Ce statut est maintenu par la Constitution de 1958. La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 modifi ant l’article 74 de la Constitution, le terme TOM est remplacé par celui de collectivité d’Outre-mer (COM). Le statut particulier de la Polynésie est fi xé par la loi n°2004-192 du 27 février 2004. Elle défi nit une organisation différente de celle du droit commun dans la mesure où le « président de la Polynésie » est créé. Il a une fonction de représentant, il dirige l’action du gouvernement et de l’administration et promulgue les « lois du pays ». Le gouvernement de Polynésie, constitué de 7 à 10 ministres, est chargé de conduire la politique de la collectivité. L’organe délibérant est l’Assemblée de Polynésie élue au suffrage universel direct tous les cinq ans.

L’autonomie administrative de la Polynésie : Malgré une organisation institutionnelle originale, la Polynésie ne bénéfi cie pas d’une autonomie politique mais d’une autonomie administrative. Ainsi, un droit spécifi que y est appliqué. D’une part sur le fondement du principe de spécialité législative et réglementaire. Selon ce principe il appartient au législateur organique de chaque COM de défi nir les conditions d’application des lois et règlements applicables. Le droit métropolitain n’est donc applicable que sur mention expresse en ce sens. D’autre part, la Polynésie dispose de « certaines catégories d’acte de l’assemblée délibérante intervenant au titre des compétences qu’elle exerce dans le domaine de la loi » communément appelées « lois du pays ». Ces actes interviennent dans des domaines très larges de la compétence de principe de la Polynésie et ne peuvent être contestés que devant le Conseil d’Etat et non le Tribunal administratif.

Cette autonomie administrative se traduit dans la répartition des compétences entre l’Etat et la Polynésie :

  • La Polynésie française est compétente dans toutes les matières, à l’exception de celles expressément attribuées à l’État. Elle peut, à travers les actes de l’assemblée de la Polynésie française et de sa commission permanente, défi nir ses propres règles dans la plupart des domaines, y compris dans les matières qui en métropole relèvent du législateur, sous réserves du respect des principes généraux inscrits dans les textes formant le bloc constitutionnel ou ceux dégagés par la jurisprudence.
  • L’Etat dispose des compétences dans les domaines régaliens : Défense, enseignement universitaire et recherche , entrée et séjour des étrangers, justice, monnaie, nationalité, et droits civiques, police et sécurité maritime, politique étrangère, Fonction publique civile et militaire, Sécurité et ordre public

M. Edouard Fritch a été élu Président de la Polynésie française à sa propre succession vendredi 18 mai 2018.

B. La Nouvelle-Calédonie, un modèle unique et Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), une entité juridique atypique

La Nouvelle-Calédonie dont les  dispositions constitutionnelles sont traitées au Titre XIII de la Constitution française, aujourd’hui comptée parmi les outre-mer français verra à la fin de l’année, sa population décider si elle souhaite rester française (1). S’agissant des TAAF, ces terres extrêmes et terres de science sont situées à des latitudes très diverses. Elles n’ont pas d'”habitants” permanents donc ni électeurs, ni élus, ni assemblée territoriale mais sont placées sous l’autorité d’un préfet. L’article 72-3 de la Constitution française indique « La loi détermine le régime législatif et l’organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton. » (2).

1.La Nouvelle-Calédonie comprend La Grande-Terre, l’île des Pins, l’archipel des Bélep, Huon et Surprise, les îles Chesterfield et les récifs Bellone, les îles Loyauté (Maré, Lifou, Tiga, Beautemps-Beaupré et Ouvéa), l’île Walpole, les îles de l’Astrolabe, les îles Matthew et Fearn ou Hunter, ainsi que les îlots proches du littoral.

Rappelons que cet archipel d’environ 270 000 habitants est marqué par une quasi guerre civile qui a eu lieu dans les années 1980. Les Accords de Nouméa du 5 mai 1998 se traduisent par la révision constitutionnelle du 20 juillet 1998 et le statut de la Nouvelle-Calédonie fait désormais l’objet du titre XIII de la Constitution.

Les modalités de transfert de compétences de l’Etat aux institutions de Nouvelle-Calédonie, les règles d’organisation et de fonctionnement de ces institutions ainsi que celles relatives à la citoyenneté, au régime électoral, à l’emploi et au statut civil coutumier sont inscrits dans la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 qui reconnaît la spécificité de ce territoire d’Outre-mer  et met en place des mécanismes spécifiques pour les populations insulaires.

Le partage de la Nouvelle-Calédonie en trois provinces semi-autonomes introduit en 1988 est consacré. Chacune de ces provinces possède une assemblée délibérante qui lui est propre et a des représentants au Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Enfin, la Nouvelle-Calédonie est pourvue d’un gouvernement qui est élu par le Congrès et reste en place jusqu’à expiration du mandat du Congrès qui l’a élu. Le Président du gouvernement est le représentant de la Nouvelle-Calédonie. Il dirige l’administration et nomme aux emplois publics. Ainsi, la Nouvelle-Calédonie est une « collectivité d’Outre-mer  à statut particulier ».

L’organisation des compétences : En dehors de ses spécificités juridiques, la Nouvelle-Calédonie dispose également de dérogations à certains grands principes et de transfert de compétences. Elle bénéficie notamment d’une certaine autonomie politique fondée sur l’article 188 de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 qui précise les conditions de vote en Nouvelle-Calédonie. En effet, pour avoir le droit de voter pour les élections des Assemblées provinciales et du Congrès, il faut résider depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie. Ceci implique l’émergence d’une citoyenneté locale qui a été autorisée par l’article 77 de la Constitution. La Nouvelle-Calédonie peut également voter des « lois du pays ». En effet, les Accords de Nouméa précisent que  « Certaines délibérations du Congrès auront le caractère de loi du pays et de ce fait ne pourront être contestées que devant le Conseil constitutionnel ».

Enfin, la France procède à des transferts de compétences vers la Nouvelle-Calédonie ou ses provinces. Les articles 21 à 23 de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 établissent ainsi la liste des missions de l’Etat pour lesquelles il est compétent, celles pour lesquelles il est associé et celles qui relèvent d’un transfert progressif (Des établissements publics sont transférés à la Nouvelle-Calédonie par des décrets en Conseil d’Etat pris sur proposition du congrès). La première catégorie recouvre principalement les fonctions régaliennes classiques et la seconde concerne largement les relations extérieures. Depuis le premier janvier 2000, les transferts ont concerné quatre domaines : le droit du travail, le commerce extérieur, la réglementation des hydrocarbures, du chrome et du nickel et l’enseignement primaire public. La Nouvelle-Calédonie est donc un modèle unique. Elle bénéficie d’un début d’autonomie.

Un référendum d’autodétermination aura lieu le 4 novembre 2018.

2. Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)

Elles sont formées par l’archipel de Crozet, l’archipel des Kerguelen, les îles Saint-Paul et Amsterdam, la terre Adélie et les îles Eparses (depuis la loi du 21 février 2007). Ces dernières rassemblent les îles tropicales de l’archipel des Glorieuses, Juan de Nova, Europa et Bassas da India dans le canal du Mozambique et Tromelin au nord de La Réunion. L’ensemble de ces terres procure à la France une Zone Economique Exclusive (ZEE)6 de plus de 2 300 000 de km² riches en ressources marines, qui contribuent à donner à la France la deuxième emprise maritime au monde après les Etats-Unis.

Les Terres australes et antarctiques françaises sont, depuis 1955 (Loi n° 55-1052 du 6 août 1955 conférant l’autonomie administrative et financière aux Terres australes et antarctiques françaises), un Territoire d’Outre-mer  doté de l’autonomie administrative et financière. Cette collectivité d’Outre-mer  a été créée par la loi du 6 août 1955 abrogeant un décret de 1924 qui rattachait précédemment ces terres au Gouvernement Général de France à Madagascar. Le décret n°2008-919 du 11 septembre 2008 pris pour l’application du statut des TAAF, est le principal texte de développement. Les TAAF ont la particularité de ne compter aucune population permanente. Le siège administratif du territoire est à Saint-Pierre (Réunion).

La collectivité dispose d’un budget d’environ 26 millions d’euros, alimenté par des ressources propres à hauteur de 80 % (impôts, taxes de mouillage, droits de pêche, philatélie, tourisme…) et par des subventions des ministères des Outre-mer  et de l’écologie. Une grande partie de ce budget est consacrée aux charges d’affrètement des deux navires (Marion Dufresne II et Astrolabe) qui assurent la desserte maritime des districts. Comme les autres territoires d’Outre-mer, elle est associée à l’Union européenne, en tant que PTOM (pays et territoires d’Outre-mer ) et bénéficie à ce titre d’un régime spécial, en particulier des financements du FED.

Carte du Ministère français des Outre-mer  

Par Publié le : 10 juillet 2018Catégories : Economie, Gestion et Finance0 CommentaireMots-clés : , , , ,